Rencontre sur la fonction paternelle

  • Le 20 janvier à Valence nous nous sommes d’abord retrouvés à quelques uns, autour du livre de l’équipe du CAMSP de Vienne « Une pratique de soins précoces pour les enfants en situation de handicap » sous la direction de nos deux collègues, Jocelyne Huguet Manoukian et Monique Perrier Genas.

    Le désir de cette rencontre avait pris forme il y a déjà plusieurs mois avec l’idée d’une rencontre de praticiens pour une conversation qui témoigne de comment la psychanalyse nous oriente dans la pratique. Ce désir a cristallisé des contacts nouveaux, des opportunités jusqu’à la possibilité d’un accueil bien sympathique à la librairie L’étincelle, occasion tout à fait nouvelle pour nous à Valence. Des collègues de Lyon nous rejoignaient, la présence du GREPAD (groupe de recherche et d’études des psychomotriciens de la Drôme et de l’Ardèche), les contacts des uns et des autres, la présence de Jacques Borie ont permis un moment d’échanges très enseignants.

    Nous avons pu mettre en valeur à la fois la richesse d’une clinique orientée par le un par un bien sûr qui suppose toujours une réponse d’un sujet au réel de la vie fût-il le plus terrible. Les collègues du CAMSP ont pu dire leur souci d’inscrire une trace avec ce livre. La trace d’une pratique, d’une expérience d’où surgit une réponse singulière, inattendue.

  • C’est de ce point que se déduit le savoir à l’inverse des protocoles standardisés qui s’imposent comme un savoir déjà là. Nos collègues ont pu souligner aussi l’indispensable du travail à plusieurs et la valeur de l’institution. Ce fût donc un moment très riche en présence de personnes nouvelles. 

    L’après midi nous étions nombreux à assister à la conférence de Jacques Borie « La fonction paternelle est-elle encore d’actualité ? » Nous pourrons l’écouter sur Radio Lacan d’ici peu. 
    Il soulignait d’emblée le lien de la psychanalyse avec son époque. En effet « la psychanalyse ne peut être entendue que si elle répond aux questions de son temps ». Il nous faisait remarquer que la psychanalyse est née au XX° siècle à un moment où « l’inconsistance de la question du père apparaît et Freud invente la psychanalyse ».   
    La question du père a donc toujours été centrale dans l’histoire de la psychanalyse, en raison de la « tension » entre la structure de l’être parlant, ses effets, ses conséquences et la place réservée à la fonction par le discours dominant. A cette tension, Jacques Borie le soulignait, ne répond nulle théorie, mais un enseignement à partir de quelque chose qui fait « signe » à partir du réel. 

  • À travers l’enseignement de Lacan Jacques Borie a fait un parcours démontrant combien cette question du père était liée à la question de l’Autre d’abord comme garantie jusqu’à l’inexistence de l’Autre. Le Nom Du Père comme nom est d’abord réduit à sa dimension symbolique. C’est la référence à la structure du langage et à ce qui l’organise, qui fait loi. La clinique va faire surgir une limite à cette dimension purement symbolique comme en témoigne Petit Hans même si la réponse par  la phobie est bien une tentative de réponse signifiante. Mais ce qui est au premier plan, c’est ce que le symbolique ne peut prendre en compte,  l’angoisse qui  témoigne d’un affect qui touche le corps. Donc quelque chose n’est pas garanti dans le symbolique nous disait-il et c’est ce qui amène Lacan à pluraliser le Nom Du Père.

    Le Nom Du Père n’existe pas mais des Noms Du Père existent. C'est ce passage qui introduit à la fonction paternelle non pas du côté de l’être mais du côté de la fonction d’un « à quoi ça sert ? »  qui est aussi à entendre dans sa dimension de nœud, dans  l’équivoque. Cette fonction ne peut se vérifier que  dans l’expérience, au un par un, dans la père–version soit la façon dont un homme fait d’une femme la cause de son désir. La garantie n’est plus liée au Un de la fonction assurant un universel  mais par les variables au un par un  qui dans l’expérience vérifient la fonction. Lacan en faisant passer la question de la fonction paternelle de père–mère à homme-femme, l’inscrit dans le rapport à la sexualité.

    Anne-Marie Meiser

  • Retrouvez l'audio de la conférence : ici