Echo de la soirée ciné psychanalyse

  • Echo de la soirée psychanalyse à Lyon 28 mars 2024

     

    par Christine Calandra

    Ombre et Lumière

    Une soixantaine de personnes a assisté à la projection du film de Wim Wenders ce 28 mars au cinéma « les Alizés » de Bron.

    Ce film est une véritable ode à l’instant présent. Nous sommes portés, comme spectateurs, par le regard quasi émerveillé du personnage principal, formidablement joué par Koji Yakusho, sur tout ce qui l’entoure.

    Nettoyeur plus que consciencieux des toilettes publiques de Tokyo, il photographie à ses moments de pause les chatoiements de la lumière dans le branchage des arbres agités par le vent. Ombre et lumière scandent le film, ombre et lumière traversent également ce personnage énigmatique.

    Nous suivons cet homme dans sa vie quasi monacale très/ trop bien réglée où chaque jour ressemble en tout point au précédent, à l’exception des menus événements, rencontres contingentes auxquelles Hirayama n’est pas fermé et qui introduisent de légères variations sur la trame répétitive de ses journées.

    D’infimes détails laissent soupçonner que cette répétition est davantage une défense que le reflet d’une vie morne.

    La discussion qui a suivi le film fut l’occasion de rappeler l’intérêt que portait Jacques Lacan au Japon et à sa culture et d’échanger sur le concept fondamental de la psychanalyse qu’est la répétition. De quelle répétition s’agit-il pour Hirayama ? La vie de cet homme ne se conjugue qu’au présent, un présent qui se répète, jour après jour. Cette répétition qui pourrait être mortifère est davantage pour lui un point de rencontre avec l’instant, auquel il consent. Il « préférerait ne pas », mais il finit par dire oui, et l’instant se reproduit. Le temps qu’il lui faut pour consentir, un peu autrement à chaque fois, écrit une poésie de la rencontre.

    Poésie également, dans le rapport d’Hirayama aux objets qui le soutiennent. Loin de la profusion d’objets et de la jouissance effrénée à laquelle nous pousse l’ère capitaliste, Hirayama a peu d’objets, le moins possible semble-t-il, mais ce sont des objets qui
    comptent pour lui. Il borde le déchet et nous conduit au cœur de l’objet perdu : nous l’accompagnons dans son nettoyage des toilettes publiques de Tokyo – chefs-d’œuvre artistiques et technologiques – Occasion pour Jocelyne Huguet Manoukian et Christian Chaverondier, qui nous ont accompagnés dans « l’effeuillage » du film, de nous rappeler que Jacques Lacan classait les civilisations en deux catégories : celles qui ont des égouts, et celles qui n’en ont pas, et d’attirer notre attention sur le traitement singulier des lieux d’aisance dans la culture Japonaise, tout en caché/montré…