Echo de la soirée des cartels "comment commence un cartel"

  • Echo de la soirée intercartel du 13 décembre 2023 à Annecy

    par Hélène Clément


    « Comment commence un cartel », qu’est ce qui nous pousse à y aller, et y retourner Encore ?

    La soirée s’est déroulée à partir des écrits de quatre cartellisant.e.s, ven.u.e.s témoigner de leur expérience singulière du cartel.
    Gilles Biot a choisi de nous parler de la fonction de plus-un, pour un cartel autour du thème de l’adolescence. Même s’il connait bien cette clinique, ce n’est pas ce savoir déjà-là qui l’a accompagné, mais une question qui a fait pour lui intrigue, à partir de la logique des quatre discours. S’occuper de sa question tout en étant vigilant à maintenir le désir de travail de chacun, supporter les impasses et points de butée, apparaissent comme autant de boussoles qui orientent sa fonction de plus-un.
    Maud Diederichs-Bridoux témoigne de son désir décidé face à la « langue lacanienne », étrangère à sa formation initiale, sa langue « maternelle universitaire ». Pas de système de pensée « prêt à porter », mais un questionnement permanent qui permet que la parole circule, tout en maintenant vivants sa curiosité et son désir de déchiffrage.
    Cécile Bayart a mis en avant la dimension éthique de la psychanalyse, pour supporter le nouveau malaise dans la civilisation. Le cartel peut permettre de nouer la dimension de l’étude et de la politique, pour supporter le poids des institutions parfois mortifères et permettre à chaque sujet de trouver comment
    faire avec la violence, l’impuissance. Le pas de côté fait dans le travail en cartel lui permet de construire sa pensée, de soutenir son désir et laisse place à l’expression des différences propre à chaque sujet parlant.
    C’est à partir du signifiant Encore, que Christine Marcepoil s’est interrogée : pourquoi continuer de travailler en cartel, Encore ? Faisant sonner l’équivoque en-corps, elle témoigne de la solitude éprouvée face à l’indéchiffrable, au savoir « troué », mais aussi du transfert de travail comme point d’appui et soutien au désir. Cela lui permet de nouer le travail en cartel avec son parcours d’analysante.


    Florent Martel était notre invité pour cette soirée. Suite à sa lecture des quatre textes, il a relevé trois signifiants que chacun des textes avait fait résonner : l’incompréhension, l’énigme et le désir de savoir.
    Le cartel est une expérience dont le ressort est d’abord l’incompréhension ; incompréhension de la langue lacanienne, qui n’est pas sans rappeler ce qui se passe dans une analyse, où il est davantage question de déchiffrage que de compréhension. Le « ce n’est jamais tout à fait cela » permet que l’on puisse continuer de parler.


    Au commencement d’un cartel, se pose d’emblée une énigme : comment formuler ce que nous ne savons pas encore ? L’énigme c’est aussi le sentiment éprouvé face à une lecture qui semble incompréhensible, qui reste à déchiffrer voire à expliquer. Le signifiant « expliquer », Florent Martel nous rappelle qu’il vient à Lacan lorsqu’il évoque le savoir relatif à l’inconscient et que l’on retrouve dans la postface au séminaire XI (Les quatre concepts fondamentaux de la psychanalyse) ; « Vous ne comprenez pas stécriture. Tant mieux, ce sera raison de l’expliquer. Et si ça reste en plan, vous en serez quitte pour l’embarras. Voyez, pour ce qui m’en reste, moi j’y survis. Encore faut-il que l’embarras soit sérieux pour que ça compte ».
    Cet embarras que chaque cartellisant peut éprouver lors de son travail en cartel, comme dans son travail d’analyse !


    Désir de savoir : même si nous supposons un sujet supposé savoir quelque part, que nous avons une demande de savoir, la question reste ouverte, pendant et après un cartel. Car le sujet reste un sujet divisé, le savoir ne peut le masquer. Pourtant, quelque chose du savoir s’attrape en cartel, un savoir se produit et ça nous arrive.

    Ainsi, Florent Martel nous a invité tout au long de cette soirée à nous demander en quoi le cartel pourrait être un dispositif analytique ? Comment se le représenter ? Il pourrait être décrit comme une forme de nouage entre incompréhension, lecture et inconscient ; le cartel ayant une fonction opérante, dans le sens où quelque chose se produit, parfois sous la forme d’une surprise.

    Enfin, le nombre restreint de participants à cette soirée, a permis des échanges très engagés, une certaine gaité, une élaboration de chaque intervenant soutenue par Florent Martel, qui nous laisse penser que nous avons participé à un cartel fulgurant le temps d’une soirée !